Côte d’Ivoire

Tidjane Thiam: “président délégué” du PDCI-RDA, une fonction qui soulève des interrogations

Mis à jour le 12 mai 2025
Publié le 12/05/2025 à 1:07 , , , ,

Le 11 mai 2025, Ernest N’Koumo Mobio, président par intérim du Parti Démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI-RDA), a signé un acte de nomination désignant Tidjane Thiam au poste de « Président Délégué ».  une fonction plus politique que statutaire qui soulève des questions juridiques.  

 

C’est une décision prise quelques heures seulement après que Thiam a annoncé sa démission de la présidence du parti, dans un contexte de pression judiciaire.

Mais cette nomination est loin d’être anodine : elle relance le débat sur la conformité de ce poste aux statuts du PDCI-RDA et à la légalité de la manœuvre politique.

Un poste… inexistant dans les textes du parti

Selon les statuts officiels du PDCI-RDA, aucune disposition ne prévoit la fonction de « Président Délégué ». Ni les statuts initiaux, ni les résolutions du dernier congrès ordinaire ne mentionnent cette fonction. Si la résolution spéciale n°03/06/2013 donne certes au président du parti le pouvoir de créer des commissions ou comités ad hoc pour améliorer la gestion du parti, elle ne donne pas expressément le droit d’instituer une fonction exécutive équivalente à celle d’un « vice-président » ou d’un « président bis ».

Par conséquent, la création de ce poste peut être considérée comme juridiquement fragile, voire frappée de nullité, si elle venait à être contestée en justice.

Une tentative d’assurer une continuité politique

Dans le fond, la nomination de Tidjane Thiam comme « Président Délégué » semble viser à maintenir un lien fort entre lui et la direction du parti, sans qu’il en soit officiellement le président. Selon la décision signée par le président par intérim, le président délégué assiste celui-ci dans la gestion du parti et lui est directement rattaché. Mais les fonctions de Thiam s’arrêteront dès qu’un nouveau président sera élu.

Il s’agit donc d’un poste temporaire, fonctionnel, sans réelle base statutaire, mais politiquement stratégique. Une manière pour Tidjane Thiam de rester dans le cœur de l’appareil dirigeant tout en préparant son retour légitime lors d’un futur congrès électif.

Une manœuvre anticipatrice en vue d’une décision judiciaire attendue

Le 16 mai, la justice se prononcera dans l’affaire opposant le PDCI à l’ancienne vice-présidente Henriette Lagou Yapo. Si la justice conclut que Tidjane Thiam n’avait pas la qualité juridique pour être élu président du PDCI — notamment à cause de la polémique sur sa nationalité au moment de son élection — alors toutes ses décisions, y compris la radiation de Yapo, pourraient être annulées.

Dans cette hypothèse, le poste de « président délégué » qu’il occupe aujourd’hui, nommé par un président par intérim et non par un congrès, pourrait lui aussi être remis en cause. Cela expliquerait pourquoi la direction du parti cherche à sécuriser une transition rapide par le biais d’un Bureau Politique chargé d’organiser un Congrès Extraordinaire, seul organe habilité à donner à Tidjane Thiam une nouvelle légitimité.

La création du poste de « Président Délégué » au PDCI-RDA est avant tout une manœuvre de survie politique, destinée à maintenir Tidjane Thiam dans le jeu malgré les incertitudes judiciaires. Mais ce poste n’est ni reconnu par les statuts, ni protégé par une base juridique solide. Sa viabilité dépendra entièrement de l’évolution du rapport de force au sein du parti, et surtout, de la décision attendue le 16 mai.

Le véritable tournant sera le prochain congrès électif : seul ce moment permettra à Tidjane Thiam de redevenir, en toute légalité et sans contestation, président du PDCI-RDA.

E. Tristan SAHI 

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